Comment cet américain né le 12 juillet 1817 à Concord Massachussets a-t-il pu, 86 ans après sa mort, avoir une telle influence sur la libération de 300,000,000 d’Indiens vivant à des milliers de kilomètres des États-Unis?
Cet apôtre de la résistance civile a inspiré Gandhi, Tolstoï, Martin Luther King et, même aujourd’hui, il demeure porteur d’espoir pour tous les peuples opprimés.
Au cours de l’un de ses séjours dans les prisons britanniques Gandhi a emprunté le livre de Henry David Thoreau intitulé « La désobéissance civile ». Cet ouvrage ne le quitta plus et il savait par cœur tous les passages clés. Chaque fois qu’il allait en prison, il en profitait pour approfondir sa compréhension de ce texte qui l’inspirait.
Au moment où il fit la connaissance de l’œuvre de Thoreau, Gandhi avait déjà défini sa politique de résistance passive qu’il avait baptisé « satyagraha », un mot en « gouyarati » qui signifie : attachement à la vérité. Il préférait l’expression résistance passive à celle de désobéissance civile retenue par Thoreau.
Malgré cela, l’essai « La désobéissance civile » de H. D. Thoreau a grandement influencé le Mahatma dans son action. Il disait de ce texte qu’il était magistral et qu’il avait fait sur lui une profonde impression. Le passage dans lequel Thoreau parle de son séjour en prison était souvent cité par Gandhi : « Je ne me sentais pas un seul instant emprisonné, et les murs me semblaient être un gaspillage de pierres et de mortier. … Je constatai que l’État était stupide et craintif… je perdis tout respect pour lui et je le pris en pitié. »
Plus loin, « … La seule obligation que j’aie le droit d’accepter, c’est de faire à chaque instant ce que je crois juste. Agir justement est plus honorable que d’obéir à la loi. » Ennemi de l’esclavage des noirs, Thoreau proclamait que : « Si un millier d’hommes, une centaine, dix, que dis-je ? Si un seul honnête homme, dans cet État du Massassuchets, cessant de tenir des esclaves, était prêt à se retirer de cette société et était enfermé pour cela dans la prison du pays, cela signifierait l’abolition de l’esclavage en Amérique. »
Et encore… : « Tous les hommes reconnaissent que la révolution est un droit, c’est à savoir le droit de refuser d’obéir, de résister à un gouvernement, lorsque sa tyrannie et son poids sont grands et insupportables. »
Au moment où Gandhi lisait ces textes pour la première fois, il était en prison exactement pour ce motif. Ironiquement, comme on l’a vu plus haut, le livre avait été emprunté à la bibliothèque de la prison.
Des millions d’hommes avaient lu Thoreau avant lui mais Gandhi, comme il l’avait fait pour les écrits de Ruskin, de Tolstoï et même pour le Sermon sur la montagne de Jésus, prenait au sérieux leurs paroles et leurs idées et il les traduisait en action. Lorsqu’il acceptait une idée, il croyait que c’était la trahir que de ne pas la mettre en pratique.
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