La société se transforme


Dans l’euphorie de la forte croissance de l’économie, les Canadiens ne se rendent pas compte de la dépendance de plus en plus grande de leur pays envers les USA. Les investissements étrangers doublent durant ces années d’après-guerre et près de 76 % viennent des USA qui deviennent le principal partenaire économique du Canada. C. D. Howe, le célèbre ministre de l’industrie et du commerce du gouvernement King qui a fait un travail du tonnerre pour le pays durant la dernière guerre, favorise une telle évolution comme ministre du gouvernement Saint-Laurent. L’opinion de Howe est importante puisqu’il est le pouvoir derrière le trône.

Il y a aussi de plus en plus de disparités entre les villes et les campagnes, entre les Canadiens anglais et les Canadiens français, entre les hommes et les femmes (ce n’est qu’en 1956 que le fédéral accordera la parité salariale entre eux mais le gouvernement de Québec n’imitera pas ce geste) et entre les provinces (les Maritimes prennent du retard alors que Montréal et Toronto progressent très rapidement). Cette inégalité s’accentue malgré la croissance économique exceptionnelle et la forte hausse démographique du pays (1946: 12 millions, 1949: 13,4 millions, 1953: 14,8 millions) et une immigration record de près de 120,000 personnes en moyenne par an. Il atteindra en 1958, 17,1 personnes.

Sur le plan politique, Terreneuve devient la dixième province du Canada suite à un plébiscite qui donne une mince majorité pour l’option canadienne (les deux autres choix étant: le statu quo qui en aurait fait un territoire britannique administré par Londres, ou l’autonomie gouvernementale). Terreneuve comprend le territoire de l’Ungava qui était depuis 1912 partie du Québec mais qui a passé à Terreneuve suite à la décision du Conseil privé de Londres appelé à trancher sur le litige frontalier entre Québec et Terreneuve. Aujourd’hui encore, le Québec ne reconnaît pas ce jugement.

A cause de sa participation militaire et économique à la guerre et de ses relations privilégiées avec les USA et l’Angleterre, le Canada connaît un véritable âge d’or de sa diplomatie. Membre des Nations Unies (ONU) et du Commonwealth, il est appelé à jouer un rôle important suite à la Déclaration de Londres de 1949 qui accorde l’indépendance à ses colonies britanniques. Avec la guerre froide, le Canada se range dans le camp occidental et rejoint, la même année, l’organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) ce qui signifie que le Canada est prêt à s’engager militairement. Cela se concrétise rapidement: en 1950, premiers soldats en Europe, en 1951, participation à la guerre de Corée. En contrepartie, le gouvernement fédéral obtient des USA qu’ils prennent en compte le Canada dans leur réseau de défense. Très actif au niveau de l’ONU, le Canada définit, petit à petit, sa niche politique sur le plan international: le maintien de la paix.