au 13 mars 2002


 

Ce dialogue touche l’ignorance du président Bush junior sur la politique interne des pays arabes et de son incapacité à reconnaître les conséquences du fléau islamique dans ces pays.

13 mars 2002

Mansour: Je viens d’écouter à la télévision le discours de Bush junior pour célébrer le sixième mois depuis le 11 septembre 2001. Je t’avoue que contrairement à ses discours du passé, Bush a été cette fois-ci un peu plus circonspect et plus diplomatique. Mais ce que je n’arrive pas à comprendre c’est que ce chef d’état, conseillé par toutes sortes de personnalités soit-disant intelligentes, n’arrive pas à dire quoi que ce soit pour isoler les terroristes potentiels particulièrement du monde arabe. J’aurais pensé qu’il est dans l’intérêt des USA de rappeler aux régimes arabes que le terrorisme islamique a déjà fait plus de dégâts chez eux, avant même les évènements traumatisants aux USA. Pourquoi Bush n’a-t-il pas rappelé au monde arabe que des centaines de milliers de personnes ont déjà perdu leurs vies dans le monde arabe, à cause de ce fléau Islamiste, que ce soit en Arabie Saoudite (les massacres de Mecca, en Égypte, en Tunisie, au Maroc et surtout en Algérie ?

Claude: Il ne semble pas comprendre ce qui se passe dans les pays arabes. Pourtant il a rencontré le roi du Maroc, Moubarak, Bouteflika, et autres et devrait être en mesure de saisir l’enjeu qui se dessine dans ces pays. C’est à n’y rien comprendre. Je n’ai pas confiance dans ce président. Il me semble un petit esprit et cela reflète sur sa politique étrangère. Mais il est populaire et sait cultiver sa cote. Un politicien restera toujours un politicien. C’est malheureux car il a l’opportunité, tout comme Lincoln et Roosevelt, de s’élever au-dessus des mesquineries de la politique et particulièrement, dans son cas, de celle du parti républicain.

Tu m’as démontré dans nos conversations passées l’importance qu’il accorde au pétrole dans sa politique. L’autre jour, lors d’un rencontre devant la Maison Blanche, il a invité le président du Nigeria à prendre la parole. Je me suis demandé ce qu’il faisait là celui-là. Les seules raisons que j’ai pu imaginer sont que ce pays est un grand producteur de pétrole et qu’il a dans sa partie nord une population musulmane nombreuse et anti-gouvernementale. Plus le temps passe plus je commence à croire à ta thèse de la préséance de l’influence du pétrole dans l’élaboration de la politique américaine..

Mansour: Il a plutôt préféré se concentrer sur la rébellion des musulmans aux Philippines qui ne demandent rien d’autre que le respect de leurs valeurs religieuses.

Claude: N’est-ce pas la démonstration de la petitesse de la politique de Bush junior?

Mansour: Mieux encore, il a indirectement condamné la résistance des Palestiniens contre le colonialisme israélien. Comment veux-tu que les masses arabes en particulier et les masses musulmanes d’une manière générale puissent croire à son message ? Mon interprétation personnelle de son message est que toute action violente contre l’oppression est considérée par Bush comme terrorisme international si cette violence est dirigée contre la chrétienté. Quand les Islamistes agissent contre des populations musulmanes d’un pays ou d’un autre, c’est un problème interne de ces pays. Si l’Afghanistan était hier un foyer du terrorisme Islamique à travers le monde, que deviendrait ce mouvement diabolique s’il réussissait à s’installer à Alger. Je ne sais pas ce que les politologues américains observent à l’heure actuelle où la nation américaine est à juste titre hantée par un islamisme virulent. L’Algérie aujourd’hui est un fruit très mûr pour ce genre de fondamentalistes Islamistes. Le parti FLN en association avec le RND,qui tous deux représentent le régime de Bouteflika, sont entre les mains de fondamentalistes musulmans en Algérie. Ces deux formations politiques ont toujours insisté pour une réconciliation avec les terroristes islamistes du pays. Ils sont culturellement plus radicaux islamistes que les Talibans de l’Afghanistan.

Claude : Au cours des dernières années, j’ai constaté la prise de pouvoir et le gouvernement des Talibans. J’ai vu les horreurs qui étaient rapportées dans leur pays. Ils me rappelaient le parti des Islamistes d’Algérie, le FIS, et la politique qu’il prônait pour l’Algérie lors des élections. Je pensais à nouveau à ma surprise, lors de l’un de mes derniers voyages en Algérie, de voir les jeunes avec une nouvelle barbe vêtus d’une jaquette blanche et d’un bonnet blanc et se prosternant dans les rues d’Alger pour les prières. Les rues et les trottoirs étaient remplis et cela plusieurs fois par jour. Ils étaient des milliers alors que quelques années auparavant, rien de cela n’existait. Il est clair que la prêche des Imams y est pour quelque chose. Mais il faut aussi se rappeler que le sol algérien était devenu fertile. Que l’Algérie d’alors avait un très grand nombre de jeunes adolescents qui ne pouvaient s’éduquer normalement et qui n’avaient aucun espoir pour le monde du futur qui leur semblait sans emploi. Je ne sais si l’armée a eu raison d’intervenir et d’arrêter la marche du FIS vers le pouvoir. Tout ce que je sais, c’est que cela n’a pas aidé à la démocratie Algérienne.

Bush junior et ses acolytes, et là j’exclus le State Department, ne semble pas comprendre l’histoire d’un pays comme le tien. Ils n’ont pas la volonté d’agir. Peut-être as-tu raison quand tu dis que Bush croit que c’est un problème interne pour les pays musulmans. C’est une erreur.

À bientôt.