au 27 juillet 2003


Ce dialogue traite de l’évolution de la guerre en Irak et des primaires démocrates qui se préparent en vue de l’élection présidentielle américaine.

Au 27 juillet 2003

Claude: Il y a longtemps que nous avons dialogué. C’est avec plaisir que je te retrouve.

Mansour: Effectivement. J’ai finalement été opéré pour réparer les trois anévrismes qui se développaient au niveau de mon abdomen, le vendredi 11 Juillet. L’opération a été un grand succès d’après mon chirurgien. Cinq jours seulement après mon opération j’ai été autorisé à quitter l’hôpital et commencer ma convalescence chez moi. Théoriquement, cette convalescence doit tout de même durer au moins 6 semaines, mais je t’avoue que je ne souffre pas tellement de mes douleurs abdominales dès maintenant. Je suis certain que dans une quinzaine de jours, au plus, je pourrai enfin reprendre une vie normale, sans me soucier des anévrismes qui étaient pour moi comme des grenades désamorcées dans mon ventre et qui pouvaient exploser à tout moment.

Claude: Bravo. Voilà de bonnes nouvelles. Je suis heureux pour toi. Bonne chance dans ta convalescence. J’espère que le problème est réglé une fois pour toute. Je vois que les médecins américains t’ont bien soigné.

Mansour: Mieux encore, mon chirurgien m’a rassuré que je pourrai voyager en Europe ou ailleurs dès le mois d’octobre et même avant cette date. Alors attends-toi à ce que je frappe à ta porte un de ces jours dans les mois à venir.

Claude: Enfin, un projet qui me semble possible et rapproché. J’espère bien vous voir car je sais que nous aurons du bon temps ensemble et que nous pourrons discuter à fond les sujets d’actualités qui nous intéressent. Tu seras toujours le bienvenu.

Mansour: Concernant la situation politique en Algérie, Ali n’a jamais été aussi désespéré. D’après lui, la vie politique y est totalement non existante alors que les problèmes socio-économiques du pays n’ont jamais été aussi dangereux pour son avenir. L’Algérie a un besoin urgent pour un débat sérieux et ouvert sur le projet d’un contrat social à long terme qui pourrait enfin lui donner une chance de trouver les solutions nécessaires à tous les problèmes socio-économiques qu’il doit gérer le plus vite possible. Mais nous n’avons pas d’organisations politiques ou sociales capables de lancer un tel débat et déboucher sur un consensus national.

Claude: Pourquoi Ali n’organise-t-il pas privément avec d’anciens ministres, haut fonctionnaires, militaires, artistes, religieux, et autres, un groupe de pensée restreint avec objectif de discuter du futur de l’Algérie et qui de façon neutre pourrait réfléchir à l’avenir du pays et faire connaître publiquement les résultats de leurs délibérations? Ou une autre idée du genre pour stimuler le peuple à reconnaître des solutions réalistes pour son avenir.

Mansour: C’est une bonne idée et je vais la lui transmettre. Mais je serais surpris qu’il accepte de s’impliquer de la sorte à ce moment-ci de sa vie. Dans un autre ordre d’idée, la dernière visite officielle de Tony Blair à Washington a une fois de plus permis au peuple américain de mesurer son président contre un autre véritable chef d’état. Je ne sais pas si tuas suivi, à la télévision, la performance de Tony Blair aussi bien face à tout le congrès américain que face à la presse américaine. Quelle démonstration d’intellect, de perspectives géopolitiques et d’analyses historiques de la place de l’Amérique dans ce 21ième siècle, de la part de Tony Blair. Il m’a rappelé beaucoup Bill Clinton. Par contre le pauvre ti-Bush n’était même pas capable de lire proprement les textes qui lui étaient déjà préparés par ses collaborateurs.

Claude: Oui, il est très impressionnant mais je crois qu’il est un menteur et au rythme où les choses vont, personne en Angleterre ne lui fera confiance dans l’avenir.

Mansour: Mais malgré la performance extraordinaire de Blair à Washington, ce pauvre homme politique se trouve aujourd’hui chez lui en Grande Bretagne dans une situation politique encore plus affaiblie qu’avant son voyage à Washington.

Claude: Et pour cause, car les hommes politiques de l’UK et les journalistes anglais n’entendent pas oublier les raisons invoquées pour faire cette guerre, que toi et moi refusions justement à cause du manque de preuve que Blair donnait. Il faut quand même que les hommes politiques soient responsables. Ce n’est pas tout d’avoir de l’éloquence et de l’intellect, il faut aussi avoir de la franchise avec le peuple et répondre de ses actes. C’est çà la démocratie. La grande majorité que Blair a obtenue à la Chambre des communes a été obtenue suite à ses affirmations devant les députés. Or, ils s’avèrent aujourd’hui, de plus en plus, que ce fut de la fausse représentation. C’est inexcusable.

Mansour: Alors que notre Bush, malgré sa performance désastreuse durant cette visite organisée pour renforcer sa popularité aux USA, semble avoir gagné du moins un peu de répit de la part de la presse américaine qui commençait à le bousculer au sujet de son fameux discours à la nation qui préparait sa guerre contre Saddam Hussein. Je n’arrive toujours pas à comprendre comment la nation la plus puissante du monde peut choisir un chef d’état aussi retardé que Bush. La seule explication à ce phénomène c’est qu’il y a un pouvoir occulte très puissant dans ce pays que personne ne peut vraiment identifier et exposer à tout le public.

Claude: Tu as mis le doigt dessus. L’argent est toute-puissante et cette toute-puissance contrôle l’organisation des élections et fait avaler au peuple ce qu’elle veut. Tout est un commerce d’images et d’illusions fabriqué et monnayé par les riches.

Mansour: Le régime républicain américain d’aujourd’hui me rappelle beaucoup le régime FLN en Algerie où le chef d’état et tout l’exécutif ne sont en fait que des instruments de forces occultes que personne ne peut identifier et encore moins voir comment elles opèrent quotidiennement. Malheureusement, tout comme en Algérie, les forces d’opposition à Bush aux USA sont aussi désorganisées et n’ont en fait rien de mieux à offrir au peuple américain. Les débats entre les soi-disant candidats démocrates à la présidence ne sont guère plus sérieux que les positions des partis politiques algériens de l’opposition à Bouteflika. Le seul candidat démocrate qui à ce jour a donné une plateforme totalement différente des républicains et de Bush est Howard Dean, l’ancien gouverneur du Maine. Ce candidat a certainement réussi à gagner la confiance des « hard core » démocrates, mais il ne pourra jamais avoir l’aval des syndicats et même de l’électorat noir américain. Plus grave encore, aucun candidat présidentiel provenant du nord-est américain n’est capable de conquérir l’électorat du mid-west et surtout du sud. Or, sans cet électorat aucun candidat démocrate n’est capable de gagner des élections présidentielles aujourd’hui aux USA.

Claude: Oh! Ne sois pas si certain, les Américains moyens ne sont pas aussi idiots qu’ils paraissent en politique. Certes, ils se sont fait vendre une salade la première fois avec ti-Bush, qui, même s’il a perdu par 700,000 votes, a été choisi président par la cour suprême. Mais les chances sont que cela ne se répètera pas car le vrai visage de Bush se découvre de plus en plus. Blair a contribué à faire voir sa faiblesse intellectuelle. De plus, ce qui arrive en Irak devient une nouvelle guérilla à la Vietnam et cela bouleverse plus en plus le peuple américain qui est incapable d’absorber de tels déboires. Tout peut arriver. Personnellement, je crois que le bon sens primera finalement, et que ti-Bush connaîtra le sort de son père.

Mansour: La seule chance qui reste aux démocrates de défaire Bush aux prochaines élections présidentielles serait d’abandonner tous les prétendants actuels à la présidence et se regrouper autour du général Clark, qui a été chef de l’OTAN du temps de Clinton. Ce candidat esttout d’abord très photogénique, ce qui est très important aux USA. Ensuite il ne peut pas être attaqué sur le front de la défense des intérêts du pays (il a passé toute sa vie professionnelle dans les rangs de la défense). Finalement, il a un avantage énorme vis-à-vis de Bush sur le plan international. Clark a toujours recommandé à l’exécutif américain de s’assurer de l’appui politique et militaire de tous les pays de l’OTAN avant de s’engager dans une aventure militaire, qu’elle soit en Afghanistan ou en Irak. Les évènements à ce jour lui ont tout de même donner raison.

Claude: Je suis en accord avec toi qu’il est un candidat attirant. Mais la politique n’est pas l’armée. Est-il capable de faire face au feu des journalistes ? Est-il capable de faire une campagne électorale pouvant le rendre sympathique aux électeurs ? Est-il capable d’énoncer avec crédibilité un programme politique autre que militaire ? Ce sont là les questions importantes. Mais c’est agréable de penser qu’il pourrait joindre les rangs.

Mansour: Même la Maison Blanche, aujourd’hui, commence à accepter le fait que pour gagner la paix en Irak, les USA seront obligés d’avoir l’aide des pays de l’OTAN, au moins et du reste de la communauté internationale si possible. Les prochaines élections présidentielles, je pense, seront décidées en faveur de celui qui pourra convaincre le public américain que l’aventure irakienne sera gérée avec l’assistance des alliés américains traditionnels. Avec Bush ou avec un nouveau président démocrate. S’ils choisissent le général Clark comme leur candidat, je pense qu’ils ont de sérieuses raisons de croire à une victoire, mais si les démocrates choisissent un des politicards qui sont déjà en lisse pour la candidature, Bush n’aura aucune difficulté à se faire réélire.

Claude: Qui vivra verra. Je crois que la France et d’autres pays ne débarqueront en Irak que si le conseil de sécurité des Nations Unies le demande. Même via l’OTAN, ils ne bougeront pas. Et, je vois là la clef de la crédibilité de Bush car il devra finalement aller à l’ONU pour solutionner son merdier Irakien. Ce faisant, il perdra la face devant les Américains car ceux-ci lui diront pourquoi ne pas avoir décidé cela avant, au lieu de subir chaque jour la mort de plusieurs jeunes soldats en Irak.

Mansour: Voila mon cher ami, comme tu vois, même quand j’étais dans mon lit à l’hôpital, je ne pouvais pas m’empêcher de penser aux événements politiques qui tourbillonnent autour de nous.

Claude: Merci de cet effort et prompt rétablissement. À la prochaine.