le 25 novembre 2002


Ce dialogue traite du président Georges W. Bush et de ses capacités.

Le 25 novembre 2002

Mansour: J’ai bien aimé la caricature psychologique que tu as faite de notre ami Bush lors de notre dernier dialogue. Je l’ai trouvé fascinante et à point. Je n’arrive pas à comprendre comment après plus de 8 ans de présidence bouffonne de Ronald Reagan, les républicains n’ont rien trouvé de mieux que de trouver quelqu’un encore plus idiot que Reagan. Mais il fauttout de même reconnaître que la machine politique républicaine a toujours su trouver le pouls de l’opinion publique américaine, bien mieux que les démocrates, depuis plus d’un demi-siècle. Et comme disent les Américains, « if it isn’t broken don’t change it ». Mais comment peut-on changer la stratégie d’un parti politique comme les républicains des USA, quand, même à ce jour, Reagan est considéré par la grande majorité de l’opinion publique américaine comme un grand chef d’état, alors qu’il n’a rien laissé de positif derrière lui. Il est vrai que c’est durant son temps d’horloge que l’empire soviétique a commencé à imploser. Maisqui peut réellement arguer qu’un président démocrate à sa place n’aurait pas proposé la même position vis-à-vis de cet «evil empire», comme Reagan l’avait dénoncé. Par contre, sur le plan domestique Reagan a été le fossoyeur de tous les rêves de la grande majorité des Américains. Il a crée un mythe de croissance économique qui n’était pas réel. Elle était entièrement dépendante de l’industrie de guerre et surtout de l’explosion des emplois dans le secteur public et notamment dans l’administration, alors qu’il avait promis à son peuple qu’il allait réduire l’importance de l’état fédéral dans la vie du commun des mortels américains. Mieux que cela, l’image virtuelle d’une prospérité éphémère a été acquise au prix d’une dette publique qui a plus que quadruplé en l’espace de 8 ans.

Claude: Je partage entièrement ton opinion sur Reagan. Je t’ai déjà parlé de son conseiller en communication que j’ai connu (il travaillait à la Maison Blanche) et qui me racontait, dès les premières années de sa présidence, qu’il voyait le président vieux, déjà à ce moment-là, et qu’il ne pensait jamais qu’il irait au bout de son premier mandat. Il en a complété deux et cela démontre bien comment la machine républicaine est capable de protéger l’image de son chef et de maîtriser l’opinion publique. Ils font de même avec ti-Bush. Ses discours sont préparés, sa stratégie élaborée par les «hawks» et il manœuvre entre eux et Powell. Il a une facilité impressionnante de bien livrer les messages et d’avoir l’air d’un homme décidé. Il est fort de ce côté-là.

Mansour: Et tout comme Reagan, Bush a hérité d’un excédent budgétaire de plus de 150 milliards de dollars de l’administration Clinton, et en l’espace de deux ans, cet excédent s’est transformé en déficit qui risque déjà de dépasser 200 milliards de dollars en 2003. Et les prévisions de ses propres analystes montrent que l’Amérique, une fois de plus, devra vivre avec un déficit budgétaire qui ne peut aller qu’en grandissant. Et pourtant, le public américain n’arrête pas de jeter des fleurs à ce président vide d’idées ou de convictions profondes. Comme tu dis si bien c’est l’image projetée du candidat qui est importante et non le message. Quel dommage !

Claude: Oui c’est cela. Le fond n’a pas d’importance. Quant au budget, je demeure convaincu que la situation actuelle ajoutée aux baisses des impôts placera l’Américain moyen dans une camisole de force. Voilà pourquoi les USA doivent avoir une coalition, non pas pour faire la guerre, mais pour partager la facture. J’ai hâte de voir ce que la France fera si ti-Bush continue son attitude agressive et arrogante et finalement engage son pays sur le chemin de la guerre. Je crois qu’à moins que les inspecteurs de l’ONU affirment que Saddam refuse de collaborer, Chirac n’embarquera pas et sera rejoint par Schröder.

Mansour: Le parti démocrate est totalement en désarroi pour le moment, tout comme le parti socialiste français. Et, sauf en cas de miracle, Bush sera réélu en 2004, car tout d’abord il est difficile de battre un président en place, ensuite les démocrates vont passer leur temps à se tirer entre les pattes à tel point qu’ils n’auront même pas la capacité de mobiliser leurs propres militants le jour du vote. Tout ce qu’on peut donc espérer en ce moment, c’est que l’Europe, d’une manière ou d’une autre, puisse faire barrage à ce fou de cow-boy du Texas qui pense qu’il peut faire tout ce qu’il veut à travers le reste du monde, avec impunité totale.

Claude: Je ne crois pas qu’il y aura guerre, parce que, premièrement les rapports des inspections seront bons, les pays alliés hésiteront et les manifestations anti-guerre auront tellement d’envergure dans tout le monde, incluant les USA, que les politiciens ne voudront pas aller si clairement contre l’opinion publique. Il est vrai que ti-Bush a toutes les chances de se faire réélire, car contrairement à son père, il a la couenne de politicien et beaucoup de qualités pour gagner. D’ailleurs, sa fiche de route électorale est remarquable. Il a perdu la première joute comme représentant, il a renversé Ann Richards, la gouverneur du Texas, que l’on disait imbattable, il a été réélu avec une très grosse majorité (67%), il a gagné les primaires et le congrès républicain et il a été élu président dès sa première élection présidentielle. Il vient de remporter des victoires importantes pour son parti deux ans après son élection. Il est fort électoralement mais petit politiquement. Mais, bien que je reconnaisse ses qualités, je n’aime pas ti-Bush. Mais pas du tout. Je crains que le mal qu’il fera aux Américains, autant aux USA qu’à l’étranger, les poursuivra longtemps. Dans quel pays un américain et sa famille peuvent aujourd’hui aller en vacances sans recevoir des regards ou des commentaires désagréables ? En Europe peut être, en Roumanie sûrement mais qui veut aller là, certainement pas dans les 50 pays à majorité musulmane du monde. L’étau se resserre et je me dis que bientôt je devrai porter une identification claire comme quoi je suis Canadien, car je ne voudrai pas passer pour un Américain à cause de l’accueil froid qu’il recevra. Le ridicule et la haine deviennent souventes fois trop agressifs.

À la prochaine.