Le ciel dans une vitre


Tout ceci n’était qu’un éveil à la réalité et au rêve, mais

il y a aussi le reflet du réel…

Le ciel dans une vitre

(Extrait d’un texte de Robert Bourgeon, 1998)

Les enfants, vous entrez dans le monde de la réalité virtuelle. Ce n’est pas un rêve où tout est possible…Voici une histoire.

Dans notre maison inhabitée, deux mésanges à longue queue et à tête rayée avaient pris possession du jardin. Elles n’étaient pas du tout sauvages. Aussi, le jour de notre arrivée, elles restèrent perchées sur les branches de l’arbre, à portée de nos mains. Le lendemain matin, l’une d’elles, prenant son élan depuis le rebord de la terrasse, se précipita sur la vitre de ma chambre et la cogna à plusieurs reprises de son bec en agitant fébrilement les ailes. Arrêtée par le verre, elle s’éloigna, se percha à nouveau sur une branche de l’arbre, puis sur le rebord de la terrasse et enfin, reprenant son élan, se jeta à nouveau sur la vitre avec une persévérance redoublée. Elle fut encore repoussée, s’éloigna encore, mais recommença son manège plusieurs fois. Toujours le même élan, toujours la même déception.

L’une après l’autre, elles recommencèrent leurs agissements plusieurs jours de suite. Après huit jours de ces essais malheureux, elles ne revinrent plus. Elles avaient sans doute fini par comprendre que ce morceau de ciel, que reflétaient si bien les carreaux des fenêtres, était une « image » inaccessible, un leurre, un mirage, un ciel artificiel. J’espère qu’elles ont continué à s’élancer dans l’espace, le vrai, portées par le vent odorant du printemps.

Ainsi, enfants du 21ème siècle, en sera-t-il de même pour vous, avec cette fausse réalité que l’on appelle virtuelle. Elle vous semblera si vraie que vous vous y lancerez avec toute l’ardeur de votre jeune âge.

Sachez éviter ce piège et ne vous précipitez pas dans ce qui n’est qu’un reflet du réel, si enthousiasmant soit-il. Vous aurez peut-être moins de chance que mes petites mésanges. Vous risqueriez de vous briser sur le froid miroir d’un leurre beaucoup plus dangereux que la vitre d’une villa.

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