Kastubaï


À l’âge où nos petites filles jouent encore avec leurs poupées « Barbie » ou s’appliquent avec soin à garder en vie leur « Tamagochi », ces petits animaux domestiques virtuels, Kasturba était déjà fiancée à son insu à Mohandas Gandhi, un garçon du même âge, qu’elle l’épousa six ou sept ans plus tard. Leur mariage dura jusqu’à sa mort, soit durant 62 ans.

La petite Kasturba ne savait ni lire ni écrire et les études la rebutaient. Malgré les efforts de Gandhi et de maîtres privés, elle n’apprit jamais à lire autre chose qu’un peu de « gouyarati », dialecte dans lequel elle fut élevée dans son village natal.

Gandhi assumait une part de responsabilité de cette situation. Il se disait que si son affection pour elle avait été pure de toute concupiscence, elle aurait mieux accepté de s’instruire au lieu de résister à ses efforts.

Encore une fillette, à peine àgée de 15 ans, elle donna naissance à son premier bébé. L’enfant ne vécut que trois jours et Gandhi, rongé par le remords se reprocha d’avoir eu des relations sexuelles avec sa jeune épouse jusque dans les jours précédant l’accouchement. La religion, la médecine, le simple bon sens auraient dû le guider mais son désir charnel était incontrôlable.

Avec le temps, leur union devint plus harmonieuse et Kasturba seconda Gandhi dans tout ce qu’il fit. En septembre 1932, dans la prison de Yeravda, le Mahatma entreprit un « jeûne jusqu’à la mort » pour protester contre une loi électorale qui plaçait les « Intouchables » dans une division séparée. Toute l’Inde jeûna avec lui.

Son épouse, sans comprendre clairement les raisons qui motivaient une telle action, jeûna également. Elle ne prenait que la nourriture nécessaire pour lui permettre d’être capable de prendre soin et d’assister son mari jusqu’à sa mort si nécessaire.

L’année suivante, Gandhi entreprit un jeûne de purification de vingt jours. Encore une fois, Kasturba l’accompagna dans sa démarche.

Finalement, en 1939, le nom de Kasturba est cité pour la première fois dans le « Who’s Who in India ». On note quelques statistiques la concernant, sa date de naissance, son mariage avec Gandhi, ses séjours en prison, etc.

Elle décéda en prison dans une propriété appartenant à l’Aga-Khan à Yeravda le 22 février 1944. Avant de mourir, elle dit à Gandhi : « N’ait pas de chagrin si je meure ». Il plaça affectueusement sa tête sur ses genoux pour la réconforter et lui répondit : « Qu’est-ce qu’il y a? Comment te sens-tu? » Comme une toute petite fille elle chuchota : « Je ne sais pas » et elle s’éteignit doucement.

Gandhi fut inconsolable. Après la crémation, il se disait qu’il ne pouvait vivre sans elle… que sa mort laissait un vide que rien ne pourrait combler. Puis, à la pensée qu’elle était morte sur ses genoux, il se demanda : « Que puis-je demander de mieux? » Et il se sentit heureux au delà de toute mesure.