Les lauriers roses de Kerrata


A mes amis Pieds-Noirs, de Sétif, de Constantine et d’ailleurs…

Pardonnez-moi, je n’avais pas
Bien mesuré votre souffrance
Lorsque se sont croisés nos pas,
Vous de « là-bas » et moi de « France ».
Vous me décriviez des couleurs,
Des parfums et des paysages,
Et je n’ai pas vu la douleur
Qu’avec pudeur dans ce message
Vous dissimuliez en riant,
Quand vous parliez des courses folles
Que vous faisiez, encore enfants,
Au bord de l’oued, en farandoles.

Alors que je ne connaissais
Que des soleils voilés de brume,
Vous m’avez parlé des lacets
De la route embaumée d’agrumes
Que vous preniez à Kerrata,
Dans un décor dont les promesses,
De laurier rose en mimosa,
Vous menaient bientôt à l’ivresse
De la mer à perte de vue :
Vous parliez d’éblouissement
A moi dont bien souvent la rue
Etait privée de firmament.

Mais quand je vins à votre table
Pour partager votre chorba
Je sentis bien qu’inconsolables
Vous vouliez m’entraîner « là-bas ».