le 6 novembre 2002


Le lendemain de l’élection législative américaine, les «mid-term», Mansour et Claude commentent les raisons de cette victoire surprenante des républicains.

Le 6 novembre 2002

Cher ami,

L’ampleur de la débâcle des démocrates d’hier lors des élection législatives américaines me laisse perplexe, même si je m’y attendais comme je te le soulignais dans mes messages précédents.

Comment un parti de l’opposition, durant une période de crise économique profonde (plus de deux millions d’Américains ont perdu leurs emplois cette année seulement, le surplus budgétaire de 250 milliards de dollars s’est subitement transformé en 150 milliards de déficit, sans parler des
scandales de corruption au sommet même des entreprises américaines les plus respectées dans le passé) peut s’arranger pour subir une telle défaite électorale? Contrairement à ton attitude très optimiste concernant l’avenir immédiat du parti de l’opposition à notre ti-Bush, je t’avais déjà dit que les démocrates, manquant de programme sérieux à présenter face aux slogans vides des républicains, manquant d’un chef respecté aussi bien par les hommes de l’appareil démocratique que par le public américain et surtout la presse américaine, allaient vers des résultats beaucoup moins flamboyants que ceux que tu prévoyais. Mais je ne m’attendais pas du tout à une telle douche froide que les démocrates ont reçue la nuit dernière. J’étais déjà persuadé que les démocrates n’allaient pas regagner la majorité à l’assemblée des représentants, mais je t’avoue que j’étais loin de m’attendre à l’élargissement de la majorité des républicains dans cette assemblée. Et surtout je ne m’attendais pas du tout à ce que les républicains reprennent la majorité au sénat. Maintenant notre ti-bush a les mains libres de faire ce qu’il veut pour les 2 prochaines années au moins.

Ces dernières élections me rappellent un peu la situation du parti républicain après la débâcle des élections de 1964 suivant la défaite d u candidat Barry Goldwater. Les démocrates d’aujourd’hui ne savent plus à quel saint se confier. Leur base électorale est restée centre-gauche alors que le leadership de ce parti, pour des raisons électorales, n’a rien trouvé de mieux que de singer le parti républicain. Mais il y a tout de même une très grande différence entre le parti républicain de Goldwater et le parti démocrate d’aujourd’hui. Les républicains bien que perdant lamentablement les élections de 1964 avaient tout de même jeté les premiers jalons d’une nouvelle idéologie conservatrice aux USA. Par contre la défaite des démocrates d’hier est basée justement sur le manque d’idéologie centrale pour ce parti. Ce qui fait qu’après ces élections, le parti démocrate passera probablement les deux prochaines années à se retrouver une virginité politique alors que Bush et son parti n’auront aucun problème de leadership et de vision politique et commenceront à engranger les centaines de millions de dollars nécessaires à acheter les «mass media» américains en vue de la prochaine élections présidentielle..

J’aimerais bien avoir tes appréciations de ces élections et de leurs conséquences sur la vie politique aux USA sur les années à venir.

A bientôt,

Mansour

 

Mansour:

Alors que les électeurs ont une tendance normale à voter contre, et qu’il y avait dans cette élection une longue liste de raisons pour voter contre Bush, celui-ci les a ramenés à lui et a été capable de redonner à son parti la majorité absolue. Il a trouvé le financement pour tous ses candidats, a travaillé comme un démon pour les visiter et les revisiter et a su frapper le clou sur la tête lors de ses discours pour impressionner les électeurs. Il est très fort «électoralement».

Tu as eu raison de prévoir cette victoire, et nonobstant le fait que les démocrates n’avaient pas de chef fort pour diriger les troupes, j’aurais crû, quand même, qu’ils auraient pu, comme les partis d’oppositions du passé, réussir. Ti-Bush est fort. Par exemple, le vote latino est passé majoritairement de son côté. Il faut se rappeler que sa première visite à l’étranger comme président fut, à la surprise de tout le monde, en Espagne. Puis il s’est lié d’amitié avec le président mexicain Fox, qu’il vient du Texas et a su mettre en évidence son attachement à la langue espagnole qu’il baragouine très bien. Je suis convaincu qu’il pensait aux votes des latinos depuis la première journée après de son élection. De même pour le vote juif de la Floride qui, je soupçonne, lui a donné beaucoup plus de votes qu’auparavant alors qu’il était dans le passé toujours tout acquis aux démocrates. On connaît la raison de ce virement de la part de ces électeurs. Combien de votes aux USA ont ainsi changé de bord depuis la dernière élection ? Cela n’a rien à voir avec l’économie! Je crois qu’il va maintenant s’attaquer à conquérir le vote noir. Il a commencé en nommant deux noirs à des postes importants de son cabinet: Powell et le secrétaire à l’éducation, mais cela n’a pas été suffisant pour améliorer son vote noir lors de cette élection. Je pense qu’il va chercher d’autres moyens d’attirer la sympathie des noirs. C’est un animal électoral…

Il a changé, depuis hier, son équipe de conseillers économiques afin de présenter une image nouvelle de cette facette de son administration qui souffrait de manque de crédibilité. Quant à son agressivité avec l’Irak, je demeure convaincu qu’il n’attaquera pas, mais se rangera derrière les Nations Unies qui présenteront une résolution capable de rallier tout le monde. Il prendra cependant le crédit qu’à cause de sa fermeté il a fait comprendre à Saddam que, cette fois, personne n’endurera de l’obstruction dans les enquêtes de l’ONU en sol irakien.

C’est à suivre car il se révèle un chef de parti hors de l’ordinaire. Je crains pour les démocrates aux prochaines élections présidentielles dans 2 ans.

Claude