L’étincelante carrière de Joliat


L’étincelante carrière de Joliat (Joliat, une équipe à lui seul; Reprenons l’histoire; Lionel Conacher; Suspensions et amendes par Dandurand).

Passons maintenant à une courte biographie d’Aurèle Joliat. Venu au Canadien en 1922, en échange pour « Newsy » Lalonde, Joliat a joué pendant 16 saisons complètes pour le Canadien. Pendant toutes ces campagnes, il s’est révélé un joueur à nul autre pareil par son astuce, par son habileté contre la mise en échec, par sa longue résistance dans le hockey majeur, malgré son poids qui n’était que de 135 livres dans ses dernières saisons avec le Canadien. Mais nous n’avons pas, dans les lignes qui précèdent, énuméré toutes les qualités de Joliat. Il fut vraiment un joueur extraordinaire et ceux qui l’ont vu évoluer à son meilleur, plusieurs se rendant au Forum à peu près uniquement pour lui, s’en souviendront toujours comme d’un as, d’un technicien incomparable.

On a parlé des 600 parties consécutives de Murray Murdoch, qui a évolué pendant des années avec les Rangers. Eh bien, nous ne nous rappelons pas que Joliat ait manqué une seule partie, au moins dans les 700 premières joutes dans lesquelles il s’est aligné avec le Canadien. C’est d’ailleurs ce que nous affirmions quand on a fait une belle manifestation à Joliat, à l’occasion de cette 700e partie. Joliat a joué en tout quelque 800 parties sous les couleurs tricolores. Dans toutes ces parties ou presque il a brillé au plus haut point. Combien de fois n’a-t-il pas compté le but égalisateur ou le but de la victoire. surtout dans ces joutes où les comptes n’étaient pas élevés et particulièrement dans les parties contre les grands rivaux, les Maroons de Montréal.

Joliat n’a pas été Howie Morenz, dont nous donnerons également les principales notes biographique, mais il avait des qualités que Morenz ne possédait pas. En outre, il a su contribuer grandement à la carrière météorique de Morenz et si l’on a pu mentionner le nom de Joliat comme fameux joueur du Canadien, dans son temps, on a toujours associé le nom de Joliat à celui de Morenz, lorsqu’on a parlé des nombreuses prouesses de celui-ci.

Voici, en quelques mots, quelques-uns des plus brillants exploits de son étincelante carrière. Dans les séries du championnat de la Ligue Nationale et de la coupe Stanley, en 1924, il a particulièrement brillé contre l’Ottawa, que le Canadien a éliminé en deux parties consécutives, ainsi que contre le Calgary et le Vancouver. Une fois, comme le fait est arrivé auparavant et dans la suite, il passa à travers toute l’équipe du Calgary pour contourner rapidement les filets et arriver seul devant le gardien Reid qu’il a déjoué, après avoir fait preuve de la plus grande habileté. C’était d’ailleurs la grande qualité de Joliat, qualité qui soulevait d’enthousiasme les plus froids spectateurs, que de déjouer assez souvent chacun des adversaires pour arriver finalement au gardien et avoir souvent le meilleur sur lui.

On a dit qu’il pouvait tourner sur une pièce de dix sous. Eh bien, combien de fois, en outre, ne l’a-t-on pas vu comme déposer la rondelle à un endroit sur la glace, pirouetter sur lui-même, contourner le joueur adversaire éberlué et aller reprendre le caoutchouc pour continuer sa course décevante au possible.

En 1931, dans la partie finale contre les Black Hawks de Chicago, dirigés, dans le temps, par Dick Irvin, Joliat fit encore ses preuves. Fois après fois, Joliat brisa les attaques des Hawks. C’est dire qu’il excellait autant à la défense qu’à l’attaque. Le fait est que les Hawks furent tellement déconcertés parce que Joliat était toujours au bon endroit au bon moment, qu’ils finirent, pour ainsi dire, par perdre courage. Finalement, le Canadien l’emporta dans une cinquième et dernière joute. Dans les buts du Chicago se trouvait nul autre que Chuck Gardiner, reconnu comme un des plus fameux gardiens de tous les temps. Après la partie, Gardiner, enthousiasmé, malgré la défaite de son club, se dirigea vers Joliat à qui il serra la main pour déclarer: « Je n’ai jamais vu une démonstration d’habileté et de beau jeu comme celle dont tu as fait preuve dans la partie. » Et n’allez pas croire que Gardiner ne ressentait pas tout ce qu’il disait. C’était d’ailleurs le sentiment unanime de tous les spectateurs présents et parmi lesquels on trouvait les plus grands experts du hockey.

En janvier 1935, paraissait dans un communiqué de la Ligue Nationale les lignes suivantes qui ne constituent pas un mince hommage: « JOLlAT, UNE ÉQUIPE À LUI SEUL », « Aurèle Joliat, le vétéran qui en est maintenant à sa 13e saison avec le Canadien, a réussi, en 3 parties, à compter tous les buts obtenus par son équipe. soit quatre. En plus, dans la partie suivante, Joliat a enregistré deux des trois buts de son club. Dans les trois parties en question, Joliat avait donné à lui seul la victoire à son club. »

* * *

Une autre fois, auparavant, dans une partie à New York, Joliat avait compté les quatre buts de son club. Le lendemain, un chroniqueur bien connu, Joe Vila, fit inscrire dans le « Sun » de New York, une manchette de huit colonnes: « JOLIAT 4, N.Y. RANGERS 2! » C’est ce soir-là que John McGraw, gérant des Giants, tint absolument à entrer dans la chambre du Canadien pour féliciter chaudement le joueur du Canadien.

Enfin, dans la partie d’ouverture contre les Maroons, à l’Arena Mont-Royal 10 décembre 1924, Joliat a enregistré 4 des 5 buts de son club, dans une victoire par 5 à O.

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Avant de citer les statistiques de la carrière de Joliat dans la Ligue Nationale, mettons en vedette les faits suivants: à sa première saison, il termina en 8e place chez les pointeurs, avec 13 buts et 9 assistances en 24 parties; la saison suivante, il finit en 3e position avec 15 buts et 5 assistances en 24 parties; en 1924-25, il termina en 3e place, cette fois avec l’impressionnant total de 29 buts et 11 assistances en 30 parties; l’année suivante, il se trouva en 6e position avec 17 buts et 9 assistances en 36 parties. Il continua ainsi durant tout son séjour avec le Canadien et on trouve toujours son nom parmi les meilleurs, même 2e, en 1927-28, derrière son coéquipier de ligne Morenz, avec 28 buts et 11 assistances.

En 1930-31, il a été choisi sur la première équipe d’étoiles; en 1931-32, il a été choisi sur la 2e, de même qu’en 1933-34 et en 1934-35.

En 1933-34, il mérita le trophée Hart accordé au joueur le plus utile à son club.

Maintes fois, des experts le désignèrent à l’aile gauche d’équipes d’étoiles de tous les temps.

Terminons sur Joliat en disant qu’il a été choisi pour faire partie du Temple de la Renommée du hockey. Il devenait le 3e joueur du Canadien à obtenir un tel honneur, les deux autres ayant été Georges Vézina et Howie Morenz. A cette occasion, Léo Dandurand, gouverneur du Temple de la Renommée, et Frank Selke, gérant général du Forum, organisèrent en son honneur une grandiose manifestation. Dans la suite, deux autres joueurs du Canadien, Lalonde et Malone, furent élus pour un record.

Voici un tableau des points obtenus par Joliat au cours de ses seize saisons avec le Canadien.

Éliminatoires

Pun. Pun.

Saison B. A. Pts en B. A. Pts en

min. min.

1922-23 13 9 22 31 1 1 2 8

1923-24 15 5 20 19 4 4 8 10

1924-25 29 11 40 85 2 2 4 21

1925-26 17 9 26 52

1926-27 14 4 18 79 1 0 1 10

1927-28 28 11 39 105 0 0 0 4

1928-29 12 5 17 59 1 1 2 10

1929-30 19 12 31 40 0 2 2 6

1930-31 13 22 35 73 0 4 4 12

1931-32 15 24 3H 46 2 0 2 4

1932-33 18 21 39 53 2 1 3 2

1933-34 22 15 37 27 0 1 1 0

1934-35 17 12 29 18 1 0 1 0

1935-36 15 8 23 16

1936-37 17 15 32 30 0 3 3 2

1937-38 6 7 13 24

Total 270 190 460 757 14 19 33 89

REPRENONS L’HISTOIRE

Reprenons maintenant notre histoire chronologique de la Ligue Nationale de hockey. En 1922, après la transaction Lalande-Joliat, le Canadien annonça un changement important pour son entraîne ment. En effet, il aurait lieu, non pas à Montréal, mais à Grimsby Beach, en Ontario.

LIONEL CONACHER

Dans le même temps. Léo Dandurand annonça qu’il avait fait à Lionel Conacher une offre de $5,000 pour une saison. Le fameux athlète excellait dans plusieurs sports, et faisait déjà grandement parler de lui. Mais Lionel ne voulait pas jouer pour le Canadien, préférant en tout cas, rester « amateur », évoluant au football pour les Argonauts de Toronto et, au hockey, pour les Yellow Jackets de Pittsburgh. C’est avec ce club qu’il devint professionnel pour ensuite briller des années dans la Ligue Nationale, en particulier avec les Black Hawks de Chicago et les défunts Maroons de Montréal. On sait que Conacher, qui était devenu député, fut choisi comme l’athlète canadien du premier demi-siècle et qu’il fut, récemment, élu au Temple de la Renommée des sports du Canada. A l’été 1954, Conacher succombait à une crise cardiaque, au cours d’une partie de balle molle entre les courriéristes parlementaires et les députés.

Comme autre transaction, réalisée celle-là, mentionnons la vente de Bert Corbeau au Hamilton. Léo Dandurand était gérant et il le faisait savoir.

Le capitaine de cette saison de 1922-23 était Sprague Cleghorn. La saison s’ouvrit le 16 décembre, une date plus hâtive que jamais. Le fait est que, depuis, la saison commence de plus en plus tôt chaque année. Cette campagne de 1955-56 ne fait pas exception, les activités débutant le 6 octobre !

Dans la saison 1922-23, le Canadien termina la première moitié, une seule partie en arrière sur l’Ottawa. Dans la seconde moitié le Canadien obtint toutefois les honneurs. Dans le classement général, le Canadien ne se trouvait qu’à un seul point de l’Ottawa.

SUSPENSIONS ET AMENDES PAR DANDURAND

C’est dans les séries éliminatoires de cette saison que se produisit un incident dont on se souvient encore. Dans la 1ière partie, à l’Arena Mont-Royal, le 7 mars, l’Ottawa a blanchi le Canadien par 2 à O. Au cours de la joute, Sprague Cleghorn et Billy Coutu attaquèrent sauvagement Lionel Hitchman et Cy Denneny. Léo Dandurand attendit pas les foudres du président Calder. Immédiatement après la joute, il condamna ses deux joueurs à $200 d’amende chacun et les suspendit pour la prochaine partie qui devait avoir lieu à Ottawa. Inutile de dire que devant ce grand geste, privant le Canadien de deux de ses meilleurs joueurs et annihilant, pour ainsi dire, ses chances de remporter le championnat, le président Calder décida de ne pas intervenir. Dans la seconde joute, avec les vétérans Didier Pitre et Odie Cleghorn à la défense, à la place des excellents Coutu et Sprague Cleghorn, le Canadien ne fit pas moins bien. Le fait est que le sort de la joute ne fut décidé que dans les dernières minutes. Tommy Gorman, de l’Ottawa, qui avait fait tous les préparatifs pour le départ de son club, train, bagages, etc., était des plus nerveux jusqu’à la toute dernière minute de jeu. La partie se termina finalement par 2 à 1 pour le Canadien et l’Ottawa l’emportait par la faible marge d’un seul but. C’est dans cette partie, comme on l’a déjà signalé, que Vézina bloqua 79 lancers!

A Vancouver, l’Ottawa fit mieux que ne le faisaient d’habitude les clubs visiteurs, en l’emportant sur les Millionnaires de Vancouver par 3 victoires à 1. Ce n’était pas tout. Les joueurs de la capitale l’emportèrent aussi par 2 victoires sans défaite sur les Eskimos d’Edmonton, vainqueurs de la Ligue de l’Ouest. Il fallut, toutefois, 2.08 de temps supplémentaire dans la première partie.